Avec l’ouverture vers les pays d’Europe centrale et orientale et vers les pays baltes, on a compris que les plurilinguismes pouvaient être liés à la situation de populations minoritaires, dans des pays où il y a une langue majoritaire et de fortes minorités, ou au statut des langues nationales, qui peuvent avoir été longtemps dominées, opprimées.
En Lituanie, par exemple, le lituanien a été supplanté, jusque dans les années 1990, par le polonais, à d’autres moments par l’allemand et plus récemment par le russe. On a affaire à une langue qui, tout en n’étant pas une langue de grande diffusion internationale, est un symbole identitaire fort pour les Lituaniens d’aujourd’hui. Une forme particulière de plurilinguisme s’installe chez eux. Les deux anciens dominants, qui sont aujourd’hui des dominés, si l’on peut dire, la population russophone d’une part et la population polonophone d’autre part, ont à se situer chacune par rapport à la majorité lituanienne et à la Russie voisine. Ces relations sont extrêmement complexes du point de vue des représentations croisées.
Ces plurilinguismes, qui sont plus ou moins vécus heureusement, sont donc beaucoup plus complexes en termes identitaires ou historiques, que ceux auxquels on s'attache habituellement quand on est, par exemple, un étudiant français, et que l'on cherche à se construire un capital linguistique de manière à le valoriser par la suite.
Si les pays européens ne sont pas marqués par un plurilinguisme aussi fort que certains pays africains, qui peuvent avoir 250 ou 260 langues, les situations n’en sont pas moins diverses. Le plurilinguisme n’y apparaît pas non plus toujours comme étant une valeur en soi dans le vécu des individus.