La plupart du temps, on se contente de faire le "pitch" du film que l'on est censé critiquer – mot à la mode qui dit bien ce qu'il veut dire. Joachim Lepastier écrit : "Rescapée des camps de la mort, Nina au visage "reconstruit" par la chirurgie retrouve son mari dans le Berlin d'après-guerre. (1) Ce dernier la prend pour une autre mais lui demande de se faire passer pour sa femme, qu’il croit morte (2), pour récupérer son héritage."
La critique de Positif mêle quant à elle description et interprétation, tout au long de son article, qui commence ainsi : "À la frontière suisse en juin 1945 …"
À la frontière suisse ? Certainement pas ! (3) Elle note un peu plus loin : "Le contraste entre Nelly et Lene, interprétées par les actrices au prénom commun Nina Hoss et Nina Kunzendorf (4), structure l'intrigue." Puis : "La fable de la déportée juive, survivante et prospère, subissant la chirurgie esthétique dans l'espoir de revoir son époux …" Elle ajoute : "Le visage fragmenté à peine reconstruit, Nelly trouve Johnny."
Nelly ne se fait pas soigner "dans l'espoir de revoir son époux", elle se fait soigner. Et il se déroule un certain temps – d'où l'ellipse – avant qu'elle ne puisse ressortir. Le mot "fragmenté" est ici trop beau pour ce qu'il recouvre. Quant à l'adjectif "prospère", Le Robert le définit ainsi : "Qui est dans un état heureux de réussite, de succès, souvent avec une idée de belle apparence. => florissant, heureux. Santé prospère. Affaires, industrie prospères."
L'interprétation que l'on donne d'un film dépend de la façon dont on le décrit dans un premier temps, de ce que l'on avance, des mots que l'on emploie.
Notes