Les enfants prirent un couteau. Mais avant qu'ils eussent exécuté l'ordre de leur père, la femelle du prisonnier survint et voletant au-dessus d'eux, leur cria : – Pourquoi voulez-vous couper la gorge à mon mari ? Les enfants ne lui répondirent pas. Son mâle lui-même lui criait : – Mon amie, laisse-les faire ! Ils commencèrent à plumer l'oiseau. La femelle revint alors et leur demanda : – Pourquoi plumez-vous mon mari ? – Laisse-les faire ! dit encore le mâle. On entreprit alors de le flamber : – Pourquoi le flamber ? demanda la femelle. – Mon amie, laisse-les faire ! Quand on le dépeça, quand on le mit à cuire, quand on le mangea, chaque fois la femelle demanda pourquoi on agissait ainsi. Et chaque fois le mâle lui conseillait de laisser faire et de se résigner.
Quand l'oiselet fut mangé, tous les enfants se virent transformés en oiselets de même espèce. Ce sont ceux-là que nous voyons encore. Auparavant il n'y avait sur terre que les deux dont je viens de raconter l'histoire."
("Le cultivateur", conte gourmantié, n° 54)