La Vie d’Adèle a obtenu la Palme d’or en 2013. A Cannes, Abdellatif Kechiche a tenu à répondre de ses actrices : elles ne font pas réellement l'amour dans le film. "Quand on meurt dans un film, on ne meurt pas vraiment, pour l'amour, c'est la même chose." Le journaliste : "Vous me rassurez !"
Cette scène édifiante montre que toute représentation pose problème, que l'on fasse semblant ou non (1). On retrouve ici Goody. De quoi a-t-on peur ? Si l'imitation est réussie, comment savoir qu'il s'agit d'une imitation et pourquoi tient-on à le savoir ? Faut-il à chaque fois le préciser, comme Kechiche (2) ? Mais pourquoi le cinéaste a-t-il filmé ses actrices en train de dormir (pour de vrai), comme l'une d'entre elles l'a reconnu ? (3) D'autres, parfois les mêmes, se diront avec Platon que si c'est de l'imitation, quel est l'intérêt ? N'avons-nous rien de mieux à faire ?
Le film pourra-t-il voyager ? "Soucieux de "ne pas offusquer une coutume, une tradition", Abdellatif Kechiche s’est dit prêt à couper certains passages du film [pour qu’il puisse être vu en Tunisie], telle cette scène de sexe explicite de dix minutes." (Le Monde, 05/06/13) Ce relativisme culturel mal compris et cette façon de devancer la censure nous amènent à nous interroger sur ce que le cinéaste a voulu faire et les limites d'une œuvre qui se laisse si facilement raccourcir.
Notes